Comment protéger votre propriété intellectuelle en Inde
L’Inde, membre de l’OMPI (Organisation mondiale de la propriété intellectuelle) depuis près de 50 ans, dispose de lois alignées sur les normes internationales. Ses tribunaux sont capables d’émettre des injonctions rapidement en cas de violation. Vous souhaitez savoir néanmoins comment fonctionne la protection des brevets, marques, droits d’auteur ou dessins et modèles en Inde ? Notre équipe juridique vous répond et vous guide dans vos démarches.
Enregistrer la propriété intellectuelle en Inde
Les droits de propriété intellectuelle en Inde sont encadrés par des lois spécifiques :
- Loi de 1999 sur les marques
- Loi de 1957 sur le droit d’auteur
- Loi de 1970 sur les brevets
- Loi sur les dessins et modèles
- Loi de 1999 sur les indications géographiques
- Loi de 1962 sur les douanes
Ces lois offrent des recours pour garantir l’application des droits de propriété intellectuelle.
La plupart des propriétés intellectuelles (brevets, marques, dessins) peuvent être enregistrées en ligne via l’Office du contrôleur général des brevets, dessins et marques (Office of the Controller General of Patents, Designs and Trademarks). Les exigences varient selon le type de propriété intellectuelle, mais les éléments suivants sont indispensables :
- Formulaire de demande : l’Office indien de la propriété intellectuelle utilise des formulaires spécifiques pour chaque type de propriété intellectuelle (brevet – formulaire 1, marque – formulaire TM-1, etc.)
- Informations sur le demandeur : le nom, l’adresse et les coordonnées de votre entreprise.
- Preuve de propriété : documents prouvant que vous détenez la propriété intellectuelle, par exemple, en cas d’enregistrement d’un brevet, documents décrivant l’invention.
- Procuration (le cas échéant) : si vous faites appel à un conseil en propriété intellectuelle pour déposer la demande en votre nom (tel qu’un avocat indien spécialisé en propriété intellectuelle), vous devrez joindre une procuration pour vous représenter.
- Spécification/Description : une description détaillée de la propriété intellectuelle, en fonction du type. Pour les brevets, il s’agit de la spécification complète décrivant l’invention.
- Taxes : l’Office indien de la propriété intellectuelle perçoit une taxe pour la demande d’enregistrement. Cette taxe dépend du type de propriété intellectuelle à enregistrer. L’enregistrement d’une marque coûte généralement de 4 000 à 10 000 roupies (environ 45 à 115 euros). L’enregistrement d’un brevet est plus onéreux et coûte généralement de 15 000 à 50 000 roupies (environ 170 à 560 euros). Il est recommandé de faire appel à un avocat indien spécialisé en propriété intellectuelle qui soit également familiarisé avec la documentation exigée des sociétés étrangères pour l’enregistrement, afin de ne pas encourir de coûts ou de retards inutiles.
Protéger les informations confidentielles avec un accord de confidentialité
Certaines stratégies commerciales des entreprises, telles que les secrets commerciaux, le savoir-faire, les méthodes de fabrication ou toute autre information gardée confidentielle pour obtenir un avantage sur la concurrence, sont protégées par le secret commercial. En Inde, les secrets commerciaux ne sont pas protégés par une loi dédiée. Par conséquent, si vous souhaitez travailler avec une entreprise en Inde, vous devez prendre des mesures pour protéger votre propriété intellectuelle. Pour ce faire, vous devez conclure des accords avec votre/vos partenaire(s) et les soumettre à un accord de confidentialité, également appelé accord de non-divulgation (NDA).
Toutes les informations confidentielles qui ne peuvent pas être enregistrées en tant que brevet, marque, droit d’auteur, dessin ou modèle doivent être protégées par un NDA. Il permet, par exemple, de partager des informations relatives à des négociations en vue de l’acquisition d’une autre entreprise ou d’un brevet. Lorsqu’il est prévu que des informations confidentielles soient partagées à des fins commerciales ou de collaboration, un accord de confidentialité garantit que ces informations ne seront pas divulguées à des tiers. Un bon accord de confidentialité inclut :
1. Les parties concernées
Identifiez clairement les deux parties à l’accord : le détenteur de la propriété intellectuelle (qui partage les informations confidentielles) et le destinataire (qui les reçoit). Indiquez les raisons sociales complètes, les adresses et les coordonnées des personnes à contacter.
2. Définition de l’information confidentielle
Précisez ce qui constitue des « informations confidentielles ». Utilisez un langage clair et concis qui décrit le type d’informations que vous souhaitez protéger. Donnez des exemples, mais évitez les listes trop longues. Indiquez si les informations développées de manière indépendante par la partie destinataire sont également considérées comme confidentielles.
3. Obligations de confidentialité
Énumérez les obligations de la partie destinataire. Indiquez les restrictions de l’utilisation, à la divulgation et à l’échange d’informations confidentielles. Notez les exceptions autorisées, telles que le partage d’informations entre parties coopérantes ou avec les autorités lorsque la loi l’exige.
4. Durée et résiliation
Déterminez la durée des obligations de confidentialité. Il peut s’agir d’une période fixe ou d’une période pendant laquelle l’information est rendue publique. Précisez les conditions dans lesquelles l’une ou l’autre des parties peut mettre fin à l’accord de confidentialité
5. Sanctions en cas de violation
Décrivez les conséquences d’une violation de l’accord de confidentialité par la partie destinataire, allant d’une injonction (décision de justice empêchant la divulgation) à des dommages-intérêts.
6. Résolution des litiges
Définissez un mécanisme de résolution des litiges découlant de l’accord de confidentialité, par exemple, une procédure de négociation, de médiation ou d’arbitrage.
7. Droit applicable et compétence juridictionnelle
Précisez la juridiction applicable à l’interprétation et à l’exécution de l’accord de confidentialité.
Une fois de plus, nous vous recommandons vivement de faire appel à un avocat indien spécialisé en propriété intellectuelle qui connaît bien le droit de la propriété intellectuelle et qui a l’habitude de rédiger des accords de confidentialité dans le cadre de collaborations entre des partenaires indiens et européens. Vous éviterez ainsi d’omettre des éléments importants.
Création de nouvelle propriété intellectuelle : les accords nécessaires
Un accord de confidentialité peut également inclure un accord sur l’utilisation de la propriété intellectuelle antérieure (Background IP). La propriété intellectuelle antérieure est la propriété intellectuelle d’une entreprise avant sa collaboration, en l’occurrence, avec une entreprise indienne. Dans une collaboration, il est fréquent de développer de la propriété intellectuelle conjointe. Il est donc important d’établir des accords clairement définis sur l’utilisation de la nouvelle propriété intellectuelle.
En Inde, il est crucial de définir à l’avance les droits d’utilisation de cette nouvelle propriété intellectuelle, notamment lorsque des technologies européennes nécessitent des adaptations locales, soit pour en réduire le coût, soit pour en assurer le fonctionnement dans le contexte indien. En l’absence d’accords clairs sur la nouvelle propriété intellectuelle, celle-ci pourra être enfreinte par d’autres. Il sera très difficile, à un stade ultérieur, de protéger cette propriété intellectuelle ou de prétendre qu’elle a été développée sur la base d’une technologie qui existait avant le partenariat.
La propriété intellectuelle dans le cadre d’une demande de brevet provisoire (PPA)
Une entreprise européenne qui souhaite partager des secrets commerciaux avec une entreprise indienne a également la possibilité de demander un brevet provisoire ou PPA. Cet outil juridique n’existe pas en Europe, mais il est utilisé en Inde, aux États-Unis et en Afrique du Sud comme moyen de protection supplémentaire. Une PPA permet de déposer des informations confidentielles (à la fois des brevets et des secrets commerciaux non enregistrés) à titre privé et sous scellé auprès de l’Office indien de la propriété intellectuelle. L’office délivrera un certificat attestant que le propriétaire des informations les a déposées à une certaine date. Contrairement aux demandes de brevet officielles, ces informations ne seront jamais rendues publiques.
Le certificat PPA peut être joint à l’accord de confidentialité afin de démontrer, à tout moment, que les informations partagées au début de la collaboration appartiennent à l’entreprise européenne et sont confirmées par l’Office indien de la propriété intellectuelle. Ce document signale formellement à la partie indienne qu’elle doit respecter la confidentialité. Il facilite également les actions en justice, car il prouve que tout a été mis en œuvre pour protéger les informations. Un brevet provisoire peut être utilisé pour protéger toute information confidentielle. Après l’expiration de l’enregistrement de la PPA (12 mois), les partenaires européens et indiens doivent rédiger une déclaration selon laquelle les informations continueront d’être protégées par les deux parties à l’avenir. Il s’agit d’un engagement supplémentaire de la partie indienne qui est démontrable, garantit la protection et, dans le pire des cas, peut être utilisé dans le cadre d’une procédure officielle.
La due diligence
Avant de s’engager avec un partenaire indien, il est important de mener une enquête approfondie sur son entreprise. La due diligence permet de réduire les risques liés à une transaction commerciale. La plupart des vérifications préalables peuvent être effectuées en ligne. Le ministère des Affaires de l’entreprise (MCA), qui réglemente les affaires commerciales en Inde, constitue une source d’information incontournable. Toutes les entreprises indiennes doivent déposer leurs états financiers et les informations sur leurs actionnaires auprès du MCA.
Pour plus d’informations, vous pouvez également consulter le site web du Credit Information Bureau India Limited (CIBIL), où vous pouvez accéder à l’historique de crédit de particuliers, d’entreprises ou de sociétés. Il est possible de vérifier d’éventuels litiges ou plaintes déposés à leur encontre, ou s’ils ont déjà été déclarés débiteurs intentionnels. Pour terminer, la fédération professionnelle du secteur dans lequel l’entreprise opère peut également être une source d’information précieuse.